Cannabis - THC - CBD

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Qu’est-ce que le cannabis ?

Le cannabis, ou chanvre, est une plante complexe originaire des régions équatoriales, dont il existe plusieurs espèces [1].

Le chanvre « Cannabis sativa », de la famille des cannabacées, parfois aussi appelé chènevis, est largement connu depuis l’antiquité. Près de 500 composés de la plante sont connus. La découverte de ses propriétés psychotropes a conduit dès le début du XXe siècle à en réglementer strictement l’usage.

Il comporte de nombreux cannabinoïdes dérivés d’un même précurseur le cannabigerol (CBG). Des enzymes spécifiques convertissent le CBG en d'autres molécules, dont les plus connues sont [2,3]:

  • Le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), principal composé psychoactif du cannabis ;
  • ET le cannabidiol (CBD) substance active le plus souvent d’origine naturelle, présent dans la fleur de cannabis séchée et retrouvé dans de nombreux produits commercialisés sous la forme d’extraits de fleurs séchées, d’huiles, de produits cosmétiques et alimentaires (boissons, sucreries, tisanes…), teintures, gélules, liquide pour e-cigarettes, pâtes, cires, cristaux, suppositoires ou produits à usage vétérinaire [3].

Les produits commercialisés sous l’étiquette CBD contiennent principalement du CBD mais, aussi, toujours un peu de THC, même si c’est à l’état de traces [1,3]. Ils peuvent aussi contenir d’autres phytocannabinoïdes et des terpènes (une classe d’hydrocarbures),dans des proportions variables selon la variété de cannabis utilisée et le mode d’extraction.

Il n’existe pas de seuil minimal concernant les quantités de CBD pour qu’un produit soit considéré « riche en CBD » [4].

Références :

[1].Atakan Z. Cannabis, a complex plant: different compounds and different effects on individuals. Ther Adv Psychopharmacol. 2012 Dec;2(6):241-54. doi: 10.1177/2045125312457586. PMID: 23983983; PMCID: PMC3736954. (Cité le 07/01/2023).

[2].Ghasemiesfe M, Ravi D, Vali M, Korenstein D, Arjomandi M, Frank J, et al. Marijuana Use, Respiratory Symptoms, and Pulmonary Function: A Systematic Review and Meta-analysis. Annals of Internal Medicine.2018;169(2):106-15. (Cité le 07/01/2023).

[3].Académie Nationale de Médecine. Cannabidiol : ce que vous devez oser demander et savoir. Communiqué du 8 décembre 2022. (Cité le 07/01/2023).

[4].Authier N. Le CBD, des vertus thérapeutiques miracles, vraiment ? Canal Détox. INSERM (Salle de presse). 11 octobre 2021. (Cité le 07/01/2023).

Qualité de la preuve : Grade 1

Mots clés : cannabis ; cannabidiol; D9-THC [cannabis ; cannabidiol ; tetrahydrocannabinol].

Comment agit le cannabis ?

Le cannabis agit sur de nombreuses cibles dans l’organisme.

Un important système de neurotransmetteurs appelé système endocannabinoïde, considéré comme responsable de nombreuses fonctions importantes, comporte deux types de récepteurs aux cannabinoïdes, CB1R et CB2R[1,2]:

  • Les CB1R se retrouvent principalement dans le cerveau - la substance grise, les noyaux gris centraux, le système limbique, l’hippocampe, le cervelet - mais aussi le système nerveux périphérique, le foie, la thyroïde, l’utérus, les os et le tissu testiculaire;
  • Les CB2R sont retrouvés principalement dans les cellules responsables de l’immunité, la rate, le système digestif, mais aussi de façon moindre dans le système nerveux périphérique et le cerveau.

En cas de consommation de cannabis le THC agit comme un agoniste qui se lie au CB1R et inhibe la libération de neurotransmetteurs normalement modulés par les endocabannabinoïdes. Il est suggéré qu’il augmente la production de dopamine, de glutamate et d’acétylcholine dans certaines régions du cerveau.

Tous ceux qui consomment du cannabis ne sont pas affectés de la même manière mais ce qui rend une personne plus sensible à ses effets négatifs n'est pas encore connu. Il existe des facteurs de vulnérabilité allant de certains gènes spécifiques impliqués dans les psychoses aux caractéristiques de la personnalité [1,3].

Qualité de la preuve : Grade 1

Mots clés : cannabis ; effets sur la santé [cannabis ; health impact].

Références :

[1]. Atakan Z. Cannabis, a complex plant: different compounds and different effects on individuals. Ther Adv Psychopharmacol. 2012 Dec;2(6):241-54. doi: 10.1177/2045125312457586. PMID: 23983983; PMCID: PMC3736954. (Cité le 07/01/2023).

[2]. Costes JM (Dir). Cannabis : données essentielles. Saint Denis; OFDT: 2007.

[3]. HAS. Outil d’aide au repérage précoce et intervention brève :alcool, tabac, cannabis chez l’adulte. Rapport d’élaboration. Novembre 2014. MAJ janvier 2021.

Quels sont les effets du cannabis sur la santé ?

Les effets du cannabis sont très variables.

Les deux principaux composants du cannabis sont le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), psychotrope addictif majeur et le cannabidiol (CBD), non addictif, ne relevant pas de la réglementation sur les stupéfiants et les psychotropes, bien qu’il présente aussi des effets psychoactifs via une interaction avec le système sérotoninergique [1].

Le THC est le principal responsable des effets du cannabis [2-4] :

Des effets immédiats :

  • Une légère euphorie accompagnée d'un sentiment d'apaisement, une légère somnolence, mais aussi parfois un malaise, une intoxication aiguë (bad trip) qui peut se traduire par des tremblements, des vomissements, une impression de confusion, d'étouffement, une angoisse très forte ;
  • Une diminution des capacités de mémoire immédiate et de concentration ;
  • Une modification de la perception visuelle, de la vigilance et des réflexes;
  • Selon la personne, la quantité consommée et la composition du produit, le cannabis peut entraîner une augmentation de l'appétit (fringales), des palpitations, une diminution de la sécrétion salivaire (bouche sèche), parfois des nausée, une crise de paranoïa.

En cas de consommation régulière [3,4]

  • Chez certaines personnes vulnérables, apparition ou aggravation de troubles psychiques comme l'anxiété, la panique, la dépression ;
  • Développement d'une psychose cannabique : bouffée délirante qui nécessite une hospitalisation dans un service spécialisé ;
  • Apparition ou aggravation d'une maladie mentale grave, comme la schizophrénie ;
  • Risque respiratoire en association avec le tabac : cancers du poumon et des voies respiratoires supérieures (VAS), risque amplifié dans certaines conditions d'inhalation (pipes à eau, « douilles »);
  • Risque vasculaire : troubles du rythme, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, artériopathies périphériques ;
  • Risque de maladies infectieuses : maladies sexuellement transmissibles, ou aggravation du risque chez des sujets immunodéprimés ;
  • Troubles de la reproduction : effets hormonaux liés à la conception, impact sur la grossesse, risques de malformations et augmentation de la morbi-mortalité
  • Dépendance psychique lors d'une consommation régulière et fréquente avec des préoccupations centrées sur la recherche, l'achat et la planification des consommations.

Le THC est le principal composant psychoactif du cannabis. Ses effets sont extrêmement variables d’un individu à l’autre et en fonction des modes de consommation.

Qualité de la preuve : Grade 1

Mots clés : cannabis ; effets sur la santé [cannabis ; health impact].

Références:

[1].Authier N. Le CBD, des vertus thérapeutiques miracles, vraiment ? Canal Détox. INSERM (Salle de presse). 11 octobre 2021. (Cité le 07/01/2023).

[2].HAS. Outil d’aide au repérage précoce et intervention brève :alcool, tabac, cannabis chez l’adulte. Rapport d’élaboration. Novembre 2014. MAJ janvier 2021.

[3].Sasco A. Cannabis et risques somatiques. Cannabis, données essentielles. Sous la direction de JM Costes. Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT). 2007 : 90-6.

[4].Verdoux H, Tournier M . Cannabis, les risques pour la santé mentale. Cannabis, données essentielles. Sous la direction de JM Costes. Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT). 2007 : 97-101.

Comment repérer un usage de cannabis ?

Il existe de nombreux outils de repérage des usages de substances psychoactives.

Parmi les questionnaires disponibles en Français (OFDT) :

DETC


Le test DETC (Diminuer, Entourage, Trop, Cannabis) [1,2]

Version française du CAGE-cannabis (Cut, Annoyed, Guilty, Eye-opener) originellement élaboré et validé aux États-Unis en 1998 et traduit en plusieurs langues, il est parmi les plus étudiés et utilisés pour repérer l’abus et la dépendance.

Il cible les adultes et les adolescents et dure 1 minute. Sur quatre questions deux réponses positives évoquent une consommation nocive de cannabis.

CAST

Le CAST (Cannabis Abuse Screening Test) [1-3]

Développé en 2003 par l’observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) il est conçu comme un outil de repérage pour mieux cerner et mesurer des usages problématiques en particulier à l’adolescence.

Il cible les adolescents et jeunes adultes et porte sur la consommation des 12 derniers mois. Il dure 5 minutes et comporte 6 questions pour un score total de 0 à 6.

  • Un score de 2 doit amener à s’interroger sérieusement sur les conséquences de la consommation [3];
  • Un score ≥ 4 signifie un risque très élevé d’usage problématique.

Le CAST avancé

Il a été développé en 2007, avec les mêmes questions mais une cotation différente avec un score de 0 à 24. Un score ≥ 7 signifie un usage problématique.

Dans une étude sur la consommation au cours de l’année passée de 1351 usagers de cannabis âgés de 15 à 64 ans [4], les seuils de CAST pour le dépistage des troubles modérés à sévère liés à la consommation de cannabis étaient respectivement de 5 (sensibilité [Se] 78,2% ; spécificité [Sp] 79,6%) et 8 (Se 86,0% ; Sp 86,7%).

Le CUDIT (Cannabis Use Disorders Identification Test)

CUDIT

Développé en 2003 en Nouvelle Zélande c'est un questionnaire spécifique au cannabis adapté du questionnaire AUDIT (Alcool Use Disorders Identification Test). Il cible les adultes et adolescents et porte sur la consommation des six derniers mois. Il dure 5 minutes avec 10 items. Sur un score total de 0 à 40 un score ≥ 8 signifie abus ou dépendance.

En 2017 au regard du questionnaire CAST, 7,4 % des adolescents âgés de 17 ans étaient susceptibles de présenter un risque élevé d'usage problématique de cannabis, soit, rapporté à l’ensemble de la population, autour de 60 000 jeunes de cet âge[4].

Ces outils de repérage doivent être considérés comme une aide guidant le raisonnement médical et ne sauraient se substituer à l’examen et au jugement cliniques [1,2].

Références

[1]. OFDT. Repérage précoce et auto-évaluation des usages à risque (Internet. cité 1 févr 2023).

[2]. Obradovic I. Guide pratique des principaux outils de repérage de l’usage problématique de cannabis chez les adolescents. OFDT. Fédération addiction. 2013. (Cité le 1 février 2023).

[3]. HAS. Questionnaire CAST (Cannabis). (Cité le 1 février 2023).

[4]. Legleye S. The Cannabis Abuse Screening Test and the DSM‐5 in the general population: Optimal thresholds and underlying common structure using multiple factor analysis. Int J Methods Psychiatr Res. 10 nov 2017;27(2):e1597.

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; cannabidiol; D9-THC ; dépistage [cannabis ; cannabidiol ; tetrahydrocannabinol ; screening].

Quels tests pour confirmer un usage de cannabis ?

Plusieurs milieux biologiques ont été proposés pour caractériser un usage de cannabis : le sang, les urines, la salive, les cheveux, la sueur, l’air expiré.

Le ∆9-THC, principal produit psychoactif chez l’homme, subit au niveau du foie un métabolisme oxydatif conduisant à la formation de 11-hydroxy-tétrahydrocannabinol (11-OH-THC) métabolite psychoactif et de 11-nor-9-carboxy-Δ9-tétrahydrocannabinol (THC-COOH), sans activité pharmacologique avérée. Au cours des étapes successives de distribution et de métabolisme du Δ9-THC, les concentrations en THC-COOH dans le sang augmentent tandis que celles de Δ9-THC décroissent [1,2].

Dans le sang. Le sang constitue un milieu idéal pour la confirmation car il permet de doser le Δ9-THC, le 11-OH-THC et le THC-COOH et de différencier les sujets « ayant fait usage de » de ceux « sous influence » de cannabis. C’est le milieu de choix dès lors qu’une composante légale entre en jeu, mais ne peut pas être utilisé pour un dépistage rapide à cause du caractère invasif du prélèvement et du temps d’analyse [1],

Dans les urines. Seulement 15à 30% du THC sanguin sont éliminés dans les urines sous forme de THC-COOH et cette élimination est très lente. Ce dosage ne donne pas d’indication sur le moment de la consommation (récente ou plus ancienne) ni sur le mode de consommation, ni sur l’impact sur les performances physiques [3]. Seul un dosage simultané de ces deux composants pourrait signifier une consommation récente, mais ce dosage n’est jamais réalisé en pratique [1,3].

La durée pendant laquelle le THC est détectable dans les urines peut varier de 1 à 60 jours selon l’importance de la consommation [4]:

  • 2 à 3 jours pour une consommation occasionnelle ;
  • 5 à 10 jours pour une consommation régulière de plusieurs joints par mois, voire par semaine ;
  • 14 à ≥ 60 jours pour une consommation plus importante de 1 à plusieurs joints par jour.

Dans la salive. La durée de détection est de 4 à 6 heures après le dernier joint fumé sans influence de l’importance de la consommation, la salive ne fixant pas le THC [4].

Sur les cheveux. Détection possible jusqu’à 90 jours seulement en laboratoire. Il n’existe pas de tests de détection rapide [4]. De faux positifs peuvent être observés chez des individus exposés de façon passive au cannabis [2].

Dans la sueur. Non utilisé car le ∆9-THC peut être éliminé par simple lavage et peut par ailleurs résulter d’une simple exposition passive. Des expérimentations sont en cours aux USA [4].

Dans l’air expiré. Les concentrations de cannabinoïdes restent très faibles. Des études sont en cours avec une fenêtre de détection d’environ 6 heures [4].

Le choix entre les différentes méthodes dépend du contexte, des informations attendues et du délai escompté pour les résultats.

Références :

[1]. Kintz P. Cannabis et cannabinoïdes de synthèse. À propos de leur détection biologique. Bulletin de l’Académie Nationale de Médecine. 2020 ;204(6) :577-82.

[2]. Institut National de Santé Publique du Québec (INSPQ). Les effets du cannabis sur la conduite automobile. Revue de la littérature. 2015.

[3]. Brenneisen R, Meyer P, Chtioui H, Saugy M, Kamber M. Plasma and urine profiles of Δ9-tetrahydrocannabinol and its metabolites 11-hydroxy-Δ9-tetrahydrocannabinol and 11-nor-9-carboxy-Δ9-tetrahydrocannabinol after cannabis smoking by male volunteers to estimate recent consumption by athletes. Analytical and Bioanalytical Chemistry. 1 avr 2010;396(7):2493 502.

[4]. TestDrogue.fr. Durée de détection du cannabis.

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; cannabidiol; D9-THC ; dépistage [cannabis ; cannabidiol ; tetrahydrocannabinol ; screening].

Quels effets du cannabis sur les fonctions cognitives?

Les effets de l’usage problématique et la dépendance au cannabis sont aujourd’hui bien documentés et les risques sont d’autant plus élevés que la consommation est précoce.

Les effets neuropsychiques du cannabis fumé apparaissent environ 15 à 20 minutes après son inhalation chez un consommateur occasionnel, un peu plus tard chez un usager régulier. Une prise de cannabis entraîne en général une euphorie modérée et un sentiment de bien-être, suivi d’une somnolence.

Le cannabis affecte principalement la mémoire à court terme et les capacités d’apprentissage, l’attention, la concentration et la perception visuelle, sensorielle et temporelle. Il entraîne une fragmentation de la pensée, une dissociation des idées, une dépersonnalisation de même qu’un temps de réaction prolongé, une difficulté à effectuer des tâches complexes [1].

À moyen terme, la consommation de cannabis est susceptible de diminuer les capacités de mémorisation et d’apprentissage. Une consommation régulière ou intensive peut conduire à un désintérêt pour les activités habituelles, à une fatigue physique et intellectuelle, à des difficultés de concentration et de mémorisation et à une humeur dépressive [2].

Les effets varient grandement d’un consommateur à l’autre en fonction de la dose absorbée, du mode de consommation, de la fréquence, de la durée d’une période d’abstinence préalable, de la tolérance individuelle, d’une vulnérabilité génétique [1-3].

Dans une étude sur 14 fumeurs fréquents de cannabis et 11 fumeurs occasionnels de 18 à 45 ans l’atteinte cognitive serait plus fréquente chez les utilisateurs occasionnels, qui étaient plus jeunes et avaient fumé plus récemment dans les 14 jours précédents, que chez les consommateurs réguliers suggérant une certaine tolérance chez ces derniers [1,2].

L’âge et la présence d’une maladie psychiatrique auraient également un impact sur les effets délétères du cannabis sur la cognition [2,3].

L’importance des effets du cannabis sur les fonctions cognitives est variable et essentiellement due à la dose et au profil des utilisateurs. La prise de cannabis potentialise en outre les effets de l’alcool.

Références :

[1]. Les effets du cannabis sur la conduite automobile. INSPQ. (cité 2 févr 2023).

[2]. L, Jutras- Aswad D. Le cannabis et ses effets délétères : pour un débat plus nuancé. Réflexion théorique. Drogues, santé, société. 2018 ;16(1) :5-30.

[3]. Desrosiers NA, Ramaekers JG, Chauchard E, Gorelick DA, Huestis MA. Smoked Cannabis’ Psychomotor and Neurocognitive Effects in Occasional and Frequent Smokers. Journal of Analytical Toxicology. 1 mai 2015;39(4):251 61.

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; troubles de la cognition [cannabis ; cognition disorders].

Quels effets de la consommation de cannabis sur la sécurité routière ?

Des études épidémiologiques ont établi un lien entre la consommation de cannabis et l’incidence accrue d’accidents de la route ou de conduite à risque.

Les effets du cannabis sur la conduite automobile sont à leur maximum 15 minutes après la consommation de ce produit et peuvent durer jusqu'à 7 heures plus tard, et parfois plus [1].

Chez des sujets ayant consommé du cannabis les fonctions perceptuelles et psychomotrices sont grandement touchées : l'attention baisse, le temps de réaction augmente et le suivi de trajectoire et le contrôle moteur diminuent [1].

Dans des simulateurs de conduite et lors de la conduite dans des conditions réelles, les effets suivants ont également été observés : augmentation de l'omission de panneaux, allongement du temps de freinage, augmentation de la déviation de la position latérale de la voiture et diminution de la performance lors de situations imprévues [1].

La plupart des études ont montré qu’il n’y avait pas forcément de corrélation directe entre les performances au volant et les concentrations plasmatiques de THC non nécessairement représentatives de celles détectées dans le cerveau. Chez certains consommateurs occasionnels des concentrations plasmatiques de THC voisines de la limite de détection de 2 à 5 ng/ml seraient suffisantes pour entraîner une altération significative des capacités à la conduite automobile alors que chez des consommateurs chroniques elles n’auraient pas nécessairement le même impact

Le risque relatif d'accident de la route est presque doublé chez les consommateurs de cannabis malgré certains comportements compensatoires des conducteurs lorsqu'ils se savent intoxiqués par le cannabis [2] et par 14 en cas d’association avec l’alcool [3]. Mais l’association fréquente cannabis et alcool rend difficile l’estimation de l’impact d’une consommation isolée de cannabis sur la conduite.

Références :

[1]. Les effets du cannabis sur la conduite automobile [Internet. INSPQ. (cité 2 févr 2023)].

[2]. Asbridge M, Hayden JA, Cartwright JL. Acute cannabis consumption and motor vehicle collision risk: systematic review of observational studies and meta-analysis. BMJ. 2012;344:e536.

[3]. Collectif. Cannabis et conduite automobile. Bibliomed. 2016 ; 807.

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; conduite automobile [cannabis ; automobile driving].

Qu’est-ce que le CBD ?

Le cannabidiol ou CBD est l’un des 100 cannabinoïdes parmi les 500 composants retrouvés dans le cannabis.

La structure moléculaire et les propriétés du CBD, découvert et 1940, ne sont décrites que dans les années 60. Il est présent dans le chanvre agricole ou « cannabis sativa » et cultivé pour son intérêt dans la papeterie, le textile et l’industrie (paillage, bétons spéciaux, plasturgie, cordages…) [1].

Le CBD n’est pas réglementairement classé comme psychotrope bien qu’il présente également des effets psychoactifs expliquant un effet apaisant mis en avant chez les personnes souffrant d’anxiété, troubles du sommeil ou de douleurs chroniques [2].

Les effets du CBD sont recherchés par les consommateurs habituels de cannabis qui verraient en lui un substitut moins dangereux et plus ou moins légal, mais aussi par toute une frange de la population qui a entendu parler de ses effets bénéfiques, a priori sans risque pour leur santé.

Le comité OMS d’experts de la pharmacodépendance précise en 2021 dans son 41e rapport [4] que le CBD, “à la condition qu’il ne contienne pas plus de 0,20 % de THC, est dépourvu de propriétés psychoactives, qu’il ne peut donner lieu à des abus et que son potentiel dépendogène est nul“.

Les surfaces occupées par la culture du chanvre en France sont passées de 3 000 ha (1991) à 15 000 ha en 2016, ce qui fait de la France le premier producteur en Europe, mais la filière du CBD y reste à ce jour encore très marginale [1].

Références :

[1]. Zobel F, Notari L, Schneider E, Rudmann O. Cannabidiol (CBD) : analyse de situation. Addiction Suisse. Rapport de recherche.2018

[2]. Canal Détox. Le CBD, des vertus thérapeutiques miracles, vraiment ? Salle de presse INSERM. 23/12/2022.

[3]. - :~:text=La France a toujours maintenu,une activité de sélection variétale.&text=d'adapter rapidement la production,polyvalente connue de l'humanité. Interchanvre. Plan filière de l’interprofession du chanvre. Ministère de l’Agriculture. 2017.

[4]. Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance. Quarante et unième rapport. 2021.

Qualité de la preuve : Grade 1

Mots clés : cannabis ; cannabidiol [cannabis ; cannabidiol]

Que dit la loi ?

La loi, le commerce et les pratiques sont variées et très variables d’un pays à l’autre.

Initialement très en retrait par rapport aux législations en vigueur en Amérique du Nord et dans la plupart des pays d’Europe, la France, qui en interdisait la vente, a dû revoir sa copie.

  • L’article R. 5132-86 du code de la santé publique [1] interdit la production, la commercialisation, la détention, l'achat ou la consommation de cannabis (plante, résine et produits dérivés). Mais il prévoit aussi que « la culture, l'importation, l'exportation et l'utilisation industrielle et commerciale de variétés de cannabis dépourvues de propriétés stupéfiantes» peuvent être autorisées, sur proposition du directeur général de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, par arrêté des ministres chargés de l'agriculture, des douanes, de l'industrie et de la santé.
  • Le 30 décembre 2021, par arrêté interministériel [2] sur la base de cette dérogation, le gouvernement français, avait autorisé la vente de produits contenant du CBD d’une teneur en THC inférieure ou égale à 0,3 %, mais interdit dans le même temps la vente des fleurs et feuilles de ce même cannabis à très faible dosage de THC.
  • La Cour de cassation, dans un arrêt des 15 et 23 juin 2022 [3], à la suite d’un arrêté émis par l’Europe, a autorisé la commercialisation des produits contenant du CBD obtenus à partir des graines et des fibres, mais aussi à partir de fleurs de cannabis sativa, à la condition qu’ils proviennent exclusivement de plantes cultivées dans l’UE et que celles-ci ne contiennent, à l’état brut, pas plus de 0,20% de THC.
  • Le Conseil d’État le 29 décembre 2022 [4] relevant que « le CBD (cannabidiol), qui n’a pas d’effet psychotrope et ne provoque pas de dépendance, ne peut être considéré comme un produit stupéfiant », a retenu « qu’il n’est pas établi que la consommation des fleurs et feuilles de ces variétés de cannabis avec un faible taux de THC comporterait des risques pour la santé publique ». Il a jugé illégale en conséquence l’interdiction générale et absolue de leur commercialisation et a ainsi annulé l’arrêté du 30 décembre 2021 interdisant de vendre des fleurs et feuilles de cannabis ayant un taux de THC (tétrahydrocannabinol) inférieur à 0,3 %.

Le CBD ne crée pas de risque pour la santé publique justifiant une interdiction générale et absolue [4].

Références :

[1]. Legifrance. Article R. 5132-86 du code de la santé publique.

[2]. Légifrance. Arrêté du 30 décembre 2021 portant application de l'article R. 5132-86 du code de la santé publique.

[3]. - .YZtplfHMJhFDalloz Actualité. La Cour de cassation légalise le cannabidiol et les fleurs de chanvre. 07 juillet 2021.

[4]. Conseil d’État. CBD : Annulation de l’arrêté interdisant la vente des fleurs et feuilles de cannabis sans propriétés stupéfiantes. Communiqué de presse. 29 décembre 2022. (Cité le 05/01/2023).

Qualité de la preuve : Grade 1.

Mots clés : cannabis ; cannabidiol ; contrôle des médicaments et des stupéfiants [cannabis ; cannabidiol ; drug and narcotic control].

Par qui le CBD est-il consommé ?

Même si sa consommation se stabilise, en 2020 le cannabis reste le produit illicite le plus expérimenté en France [1].

En 2020 près de la moitié des adultes (46%) entre 18 et 64 ans en ont déjà consommé avec une stabilisation entre 2017 et 2020. Un adulte sur dix en a consommé dans l’année avec une prédominance masculine (55% vs 38%). 3,2% en consomment au moins 10 fois dans le mois, en léger recul par rapport à 2017 (3,6%) [1].

La tranche d’âge la plus consommatrice est celle des 18-29 ans suivie de celle des 30-39 ans [2].

Dans une étude de cohorte conduite chaque année dans les 50 états américains, la National Survey on Drug Use and Health (NSDUH) [3] l’usage de la marijuana chez les adultes a doublé depuis 10 ans, atteignant 13,3% en 2014.

Parmi ceux en ayant consommé au cours de la dernière année 90,2% déclarent un usage uniquement récréatif, 6,2% un usage médical et 3,6% les deux à la fois. 33% disent ne pas en parler avec leur médecin, 28%, 32% et 8% déclarent respectivement que leur médecin est neutre, favorable et défavorable.

L’évolution de l’usage du cannabis révèle une augmentation de la part des femmes et un vieillissement des usagers dans l’année qui sont des trentenaires et des quadragénaires [1].

Références :

[1]. Lemoine V, Bessarion C, Champion S, Delibéros M, Charbuy C. Usages du cannabis en France : premiers résultats du Baromètre santé de Santé publique France 2020. Santé publique France. 02 décembre 2021 (cité le 03 :03 :2023).

[2]. Ghasemiesfe M, Ravi D, Vali M, Korenstein D, Arjomandi M, Frank J, et al. Marijuana Use, Respiratory Symptoms, and Pulmonary Function: A Systematic Review and Meta-analysis. Annals of Internal Medicine.2018;169(2):106. (cité le 03/03/2023).

[3]. Azcarate PM, Zhang AJ, Keyhani S, Steigerwald S, Ishida JH, Cohen BE. Medical Reasons for Marijuana Use, Forms of Use, and Patient Perception of Physician Attitudes Among the US Population. J GEN INTERN MED. 1 juill 2020;35(7):1979 86. (cité le 03/03/2023).

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; cannabidiol ; usagers de drogues [cannabis ; cannabidiol ; drug users].

Comment est-il consommé ?

Le produit est principalement commercialisé sur le Web (plusieurs centaines de sites sont présents sur la toile en Europe) et dans des magasins plus ou moins spécialisées y compris dans les boutiques de e-cigarettes.

On trouve dans le commerce un très grand choix de produits : fleurs séchées, huiles, produits alimentaires (thé, bonbons), teintures, gélules, liquide pour e-cigarettes, pâtes, cires, cristaux, suppos…

La forme la plus consommée est la fleur qui est essentiellement fumée et qui contient la plupart du temps au moins 0,2% de THC, très prisée des consommateurs ou anciens consommateurs de cannabis.

60% des gens interrogés en fument tous les jours, d’autres s’en font des tisanes [1].

Les huiles essentiellement extraites des graines et des bourgeons de la plante, où le CBD est particulièrement concentré, arrivent en seconde position et trouvent un intérêt particulier chez les néo-consommateurs.

Le marché attire aussi de plus en plus d’usagers de e-cigarettes.

Les autres formes sont consommées de façon plus marginale.

Tous ces produits ne doivent, nous l’avons vu, ne contenir, pour qu’ils soient vendus en France, que moins de 0,3% de THC. Le THC peut être retrouvé dans les dépistages sanguins chez les consommateurs quotidiens de CBD même si celui-ci n’en contient que des traces [2].

La dernière fois qu'ils ont consommé du cannabis, la plupart des usagers dans l’année l’ont fumé sous forme de joint (94%), loin devant le vapotage ou la vaporisation (2,3%), l’ingestion alimentaire de produits dérivés du cannabis ou en infusion (2,2%) ou l’usage du narguilé ou du bang (moins de 1%).

Parmi ceux qui ont fumé un joint lors de leur dernier usage, 61% ont pris de l’herbe et 37% de la résine, presque tous l’ayant mélangé avec du tabac (95%) [3].

La prédominance récente de l’herbe se confirme et s’inscrit dans le contexte des mutations du marché du cannabis en France observées depuis 2015 [3].

Références :

[1]. Ghasemiesfe M, Ravi D, Vali M, Korenstein D, Arjomandi M, Frank J, et al. Marijuana Use, Respiratory Symptoms, and Pulmonary Function: A Systematic Review and Meta-analysis. Annals of Internal Medicine.2018;169(2):106. (cité le 03/03/2023).

[2]. Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance. Quarante et unième rapport. 2021.

[3]. Lemoine V, Bessarion C, Champion S, Delibéros M, Charbuy C. Usages du cannabis en France : premiers résultats du Baromètre santé de Santé publique France 2020. Santé publique France. 02 décembre 2021 (cité le 03 :03 :2023).

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; cannabidiol ; Consommation de marijuana [cannabis ; cannabidiol ; Marijuana Use].

Quels sont les effets et les risques de la consommation de CBD ?

Selon l’OMS les effets recherchés sont le bien-être de façon générale, le soulagement des douleurs chroniques et les troubles du sommeil [1].

On prête au CBD des propriétés antioxydantes.

Dans l’étude américaine de la NSDUH [2] les raisons médicales avancées le plus fréquemment sont l’anxiété (49%), l’insomnie (47%), les douleurs chroniques (42%) et la dépression (39%).

Une enquête suisse montre que les personnes interrogées en usent dans la majorité des cas dans les syndromes fibromyalgiques (26,9% à 30,9%), l’arthrite, les rhumatismes et les problèmes musculo-articulaires en général, dans les syndromes dépressifs chroniques (19,7% des cas), dans beaucoup d’autres troubles physiques (30% des cas), dans les troubles déficitaires de l’attention chez les hyperactifs (5 à 8% des cas) et pour une multitude d’autres symptômes dans les 10 à 15% des cas restants [3].

Des effets indésirables sont décrits essentiellement dans les cas où le produit est consommé quotidiennement [4]. On rapporte somnolence, fatigue, diarrhées, nausées et vomissements, modifications de l’appétit et du poids, fièvre...

On décrit aussi des états de confusion, des étourdissements et des chutes de tension. L’usage régulier peut être toxique pour le foie.

Le CBD est dépourvu de propriétés psychoactives et ne peut donner lieu à des abus. Son potentiel dépendogène est nul. Des interactions médicamenteuses sont connues (coumadine et clobazam). L’usage n’est pas conseillé chez les femmes enceintes ou qui allaitent [4].

Références:

[1]. Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance. Quarante et unième rapport. 2021.

[2]. Azcarate PM, Zhang AJ, Keyhani S, Steigerwald S, Ishida JH, Cohen BE. Medical Reasons for Marijuana Use, Forms of Use, and Patient Perception of Physician Attitudes Among the US Population. J GEN INTERN MED. 1 juill 2020;35(7):1979 86. (cité le 03/03/2023).

[3]. Ghasemiesfe M, Ravi D, Vali M, Korenstein D, Arjomandi M, Frank J, et al. Marijuana Use, Respiratory Symptoms, and Pulmonary Function: A Systematic Review and Meta-analysis. Annals of Internal Medicine.2018;169(2):106. (cité le 03/03/2023).

[4]. Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance. Quarante et unième rapport. 2021.

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; cannabidiol ; effets indésirables [cannabis ; cannabidiol ; adverse effects].

Dans quelles situations médicales l’usage du cannabis thérapeutique est-il autorisé ?

L’utilisation du THC en pratique médicale courante, bien qu’autorisée dans les pays qui ont légalisé le cannabis (Canada, Pays-Bas, un certain nombre d’états américains…), est loin d’être habituelle et standardisée.

À titre expérimental en France, l'usage médical du cannabis sous la forme de médicaments peut être autorisé depuis juin 2021, et au plus tard jusqu'au 25 mars 2024 [1,2]. Cette expérimentation est réalisée dans un cadre contrôlé et limité auprès de patients souffrant de maladies graves.

Cinq indications ont été retenues par le comité scientifique temporaire pour le suivi de l’expérimentation du cannabis à des fins médicales [1,2] :

  • Certaines formes d'épilepsie pharmaco-résistantes ;
  • Certains symptômes rebelles en oncologie liés au cancer ou au traitement anti-cancéreux ;
  • Situations palliatives ;
  • Spasticité douloureuse de la sclérose en plaques ou des autres pathologies du système nerveux central.

Le patient doit être informé des précautions particulières d'emploi de ces médicaments, de ses effets indésirables et des contre-indications. Une étude internationale a montré que la spasticité douloureuse de la SEP est une des cinq circonstances médicales pour lesquelles le cannabis est utilisé [3].

Références:

[1]. Service-Public.fr. Cannabis thérapeutique. Direction de l’information légale et administrative (Première ministre). Vérifié 27 mars 2023 (Internet). (cité 4 avr 2023).

[2]. ANSM. Dossier thématique - Cadre et mise en œuvre de l’expérimentation du cannabis médical – ANSM . MAJ 01/02/2023. (cité 4 avr 2023).

[3]. Filippini G, Minozzi S, Borrelli F, Cinquini M, Dwan K. Cannabis and cannabinoids for symptomatic treatment for people with multiple sclerosis. Cochrane Database Syst Rev. 2022 May 5;5(5):CD013444. doi: 10.1002/14651858.CD013444.pub2. PMID: 35510826; PMCID: PMC9069991. (Cité le 05 avril 2023).

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; utilisations thérapeutiques [cannabis ; therapeutic uses].

Sous quelles formes est-il utilisé ?

Tous les produits et sous-produits ont fait ou font l’objet d’expérimentations cliniques.

Une revue de 25 essais contrôlés randomisés (ECR) [1] représentant 3 763 participants dont 2 290 consommant des cannabinoïdes sur une durée entre 3 et 48 semaines a comparé contre placebo le nabiximols (spray buccal combinaison à parts égales de THC et CBD), avec des cannabinoïdes synthétiques imitant le THC (7 études), un extrait oral de THC de Cannabis sativa (2 études), du Cannabis végétal inhalé (1 étude). D

’autres études ont comparé au placebo le dronabinol extrait de THC de Cannabis sativa et le cannabis inhalé à base de plantes.

D’autres produits à disposition sont soit directement extraits de la plante, soit obtenus par isomérisation de cannabidiol ou fabriqués synthétiquement : solutions huileuses (voie orale ou sublinguale), topiques sous forme de crèmes ou de pommades; l’herbe ou la fleur de cannabis peuvent être directement fumées, inhalées, mélangées à de la nourriture ou infusées (tisanes).

Le Cannabis sous toutes ses formes est utilisé le plus souvent en dehors de tout contrôle médical en automédication par les malades atteints de SEP et souffrant de troubles spastiques ou de douleurs chroniques intenses [1,2].

Références:

[1] Filippini G, Minozzi S, Borrelli F, Cinquini M, Dwan K. Cannabis and cannabinoids for symptomatic treatment for people with multiple sclerosis. Cochrane Database Syst Rev. 2022 May 5;5(5):CD013444. doi: 10.1002/14651858.CD013444.pub2. PMID: 35510826; PMCID: PMC9069991. (Cité le 05 avril 2023).

[2] Jones É, Vlachou S. A Critical Review of the Role of the Cannabinoid Compounds Δ9-Tetrahydrocannabinol (Δ9-THC) and Cannabidiol (CBD) and their Combination in Multiple Sclerosis Treatment. Molecules. 25 oct 2020;25(21):4930. (Cité le 05 avril 2023).

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; utilisations thérapeutiques [cannabis ; therapeutic uses].

Quelle est l’efficacité sur les contractures musculaires douloureuses de la SEP?

La spasticité et les douleurs chroniques neuropathiques sont des manifestations sévères et communes de la SEP, augmentant avec la progression de la maladie, aggravant le handicap et entravant les activités de la vie quotidienne [1].

Dans une revue systématique de 25 études évaluant l’efficacité de différents cannabinoïdes [1] :

  • Trois essais ont comparé en double aveugle versus placebo, sur des durées limitées de 6 semaines pour les 2 premiers essais et 14 semaines pour le dernier, le nabiximols (Sativex®) dosé à 2,7mg de Delta-9-THC + 2,5 mg de CBD délivré sous la forme de pulvérisation buccale, sur des échantillons respectivement de 160, 189 et 337 patients dont le traitement habituel était insuffisamment efficace [1]. Ont été considérés comme répondeurs les patients ayant une réduction d’au moins 30 % du score identifié sur une échelle analogique de la douleur entre le début et la fin de l’étude. Globalement sur les trois études 35% des patients étaient considérés comme répondeurs comparativement à 25% avec le placebo, mais aucun des trois essais considéré séparément ne permettait de conclure.
  • Un quatrième essai britannique sur 572 patients aboutit aux mêmes conclusions que le résultat des trois autres études regroupées.

Une AMM européenne a été accordée en 2014 au nabiximols (Sativex°), dans l’indication des douleurs spastiques liées à la SEP, en complément des médicaments classiques quand ceux-ci s’avèrent insuffisamment efficaces mais les niveaux de preuves scientifique restent faibles.

Comparé au placebo le nabiximols réduit probablement à court terme la sévérité de la spasticité chez les patients atteints de SEP mais il n’y a pas de certitude en ce qui concerne les douleurs neurologiques chroniques ni la qualité de vie [1].

Références:

[1] Filippini G, Minozzi S, Borrelli F, Cinquini M, Dwan K. Cannabis and cannabinoids for symptomatic treatment for people with multiple sclerosis. Cochrane Database Syst Rev. 2022 May 5;5(5):CD013444. doi: 10.1002/14651858.CD013444.pub2. PMID: 35510826; PMCID: PMC9069991. (Cité le 05 avril 2023).

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; sclérose en plaques ; spasticité musculaire ; douleur chronique [cannabis ; multiple sclerosis ; muscle spasticity ; chronic pain].

Quels sont les effets secondaires du nabiximols ?

Cette spécialité contient du THC et peut entrainer une dépendance. Les autres effets secondaires potentiels sont ceux rencontrés dans l’usage prolongé du cannabis.

Dans une revue de 38 essais contrôlés randomisés (ECRs) versus placebo et études ouvertes post-ECR [1] sur les données de sécurité du nabiximols 15 concernaient la spasticité et 16 les douleurs neuropathiques. Les arrêts de traitement en raison d’effets secondaires étaient comparativement au placebo de 5,4% vs 2,8% et 12,9% vs 5,3% respectivement pour la spasticité et les douleurs neuropathiques comparativement au placebo. Les effets les plus fréquents étaient des vertiges, des nausées et de la fatigue.

Des effets secondaires sévères étaient signalés dans 4,7% des cas pour la spasticité et 4,1% pour les douleurs neuropathiques comparativement à 0,8 % et 3,1 % pour le placebo [1]. Dans une autre étude observationnelle sur 4 351 patients [1] les effets secondaires sévères étaient de 3,1% (n= 137).

Une revue systématique d’études observationnelles entre 2000 et 2017 a montré que, dans la pratique les sprays de nabiximols n’affectaient pas les capacités de conduite automobile mais une évaluation régulière est nécessaire surtout après les rechutes et modifications de traitements [2].

Les observations dans la pratique réelle confirment que le nabiximols en spray buccal pour le traitement des spasticités et douleurs chroniques est bien toléré avec un profil de sécurité favorable [1].

Références:

[1]. Prieto González JM, Vila Silván C. Safety and tolerability of nabiximols oromucosal spray: a review of real-world experience in observational studies, registries, and case reports. Expert Review of Neurotherapeutics. 4 mai 2021;21(5):547 58.

[2]. Celius EG, Vila C. The influence of THC:CBD oromucosal spray on driving ability in patients with multiple sclerosis-related spasticity. Brain Behav. 2018 Apr 6;8(5):e00962. doi: 10.1002/brb3.962. PMID: 29761015; PMCID: PMC5943754.

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; sclérose en plaques ; spasticité musculaire ; douleur chronique ; nabiximols ; effets secondaires [cannabis ; multiple sclerosis ; muscle spasticity ; chronic pain ; nabiximols ; advers effects].

Quelle est l’efficacité du CBD dans l’épilepsie ?

20 à 30 % des épilepsies sont pharmaco résistantes c’est-à-dire qu’il persiste des crises épileptiques malgré un traitement médicamenteux bien conduit [1].

Les études les plus probantes concernant l'efficacité du CBD portent sur certaines formes graves d’épilepsie quand celles-ci résistent au traitement classique associant souvent plusieurs antiépileptiques.

Le syndrome de Dravet (SD)

Antérieurement appel« épilepsie myoclonique sévère du nourrisson (EMSN)», le SD est une épilepsie grave de l’enfant, d’origine génétique près de 8 fois sur 10, qui débute avant l’âge d’un an, le plus souvent vers l’âge de 5 mois, par des crises convulsives qui se manifestent par des secousses musculaires avec une perte de connaissance, souvent déclenchées par de la fièvre, et par la suite des crises d’épilepsie de divers types. Il entraîne un retard de développement généralement évident après l’âge de 2 ans (difficultés de langage, mauvaise coordination des mouvements, troubles du comportement). Sa prévalence, sans doute sous-estimée, est entre 1 sur 20 000 à 40 000 naissances [2].

Dans une étude en double aveugle versus placebo, multicentrique [3], sur 199 patients âgés de 2 à 18 ans présentant un SD confirmé avec au moins 4 crises convulsives sur une période de référence de 4 semaines, tout en recevant au moins un médicament antiépileptique, 66 ont été randomisés dans un groupe auquel on donnait 10 mg/kg/jour de CBD oral purifié sous forme de gouttes buccales (CBD10), 67 dans un groupe auquel on donnait 20 mg/kg/jour de CBD (CBD20) et 65 dans le groupe placebo. Au bout d’une période de suivi de 14 semaines le pourcentage de réduction de la fréquence des crises convulsives par rapport au départ était de 48,7 % pour le groupe CBD10 et de 45,7 % pour le groupe CBD20, contre 26,9 % pour le groupe placebo. Le pourcentage de réduction par rapport au placebo était de 29,8 % (8,4-46,2 ; p=0,01) pour le groupe CBD10 et de 25,7 % (2,9-43,2 ; p=0,03) pour le groupe CBD20.

Le syndrome de Lennox-Gastaut (SLG)

Encéphalopathie épileptique rare, sévère et précoce, le SLG caractérisé par une triade de déficience intellectuelle, de multiples types de crises convulsives et d'anomalies typiques de l'électroencéphalographie (EEG) [2].

Un essai contrôlé randomisé versus placebo multicentrique en double aveugle [4] a inclus 225 patients âgés de 2 à 55 ans présentant 2 ou plusieurs crises convulsives par semaine sur une période de référence de 28 jours. Le nombre moyen de crises était de 85 pour l’ensemble combiné des groupes. 76, 73 et 76 ont été assignés à un traitement de cannabidiol, ajouté à leur traitement habituel, respectivement à la dose de 20 mg/kg, 10 mg/kg et placebo.

Le pourcentage moyen de réduction de la fréquence des crises pendant la période de traitement était de 41,9%, 37,2% et 17,2% respectivement dans les groupes 20 mg (p = 0,005 comparativement au placebo), 10 mg (p=0,002 comparativement au placebo) et placebo.

Chez les enfants et les adultes présentant un syndrome Dravet ou un syndrome de Lennox-Gastaut l’ajout à leur traitement antiépileptique habituel de 10 à 20 mg/kg/jour de cannabidiol permet une réduction significative de la fréquence des crises convulsives. L’EPIDYOLEX® en association au clobazam dans le traitement des crises d’épilepsie associées au syndrome de Lennox-Gastaut (SLG) ou au syndrome de Dravet (SD), chez les patients de 2 ans et plus, peut être délivré en officine sur prescription initiale hospitalière ou d’un neuropédiatre [5,6]

Références:

[1]. Centre de référence des épilepsies rares de l’Hôpital universitaire Robert-Debré. Épilepsie de l’enfant et de l’adolescent. 2018. (Cité 2 déc 202).

[2]. Orphanet. Le syndrome de Dravet. Encyclopédie Orphanet Grand public.(Cité le 07/05/2023).

[3]. Miller I, et al. Dose-Ranging Effect of Adjunctive Oral Cannabidiol vs Placebo on Convulsive Seizure Frequency in Dravet Syndrome: A Randomized Clinical Trial. JAMA Neurol. 1 mai 2020;77(5):613 21. (Cité le 07/05/2023).

[4]. Devinsky O, Patel AD, Cross JH, Villanueva V, Wirrell EC, Privitera M, et al. Effect of Cannabidiol on Drop Seizures in the Lennox-Gastaut Syndrome. N Engl J Med. 17 mai 2018;378(20):1888 97. (Cité le 07/05/2023).

[5]. Cannabidiol. EPIDYOLEX 100 mg/ml . Commission de la transparence. Première évaluation. Avis du 13 mai 2020.

[6]. VIDAL. Épilepsie : EPIDYOLEX (Cannabidiol) disponible en officine. 05 janvier 2023.

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; épilepsie ; traitement [cannabis ; epilepsy ; treatment].

Quels sont les effets secondaires ?

Les évènement indésirables (EI) du CBD les plus fréquents sont une somnolence, une perte d’appétit, de la diarrhée, des vomissements, une infection des voies respiratoires supérieures et des troubles du comportement [1,3].

Dans l’étude de Devinsky et al [2] sur 149 patients assignés au groupe traitement ces évènements sont doses dépendant, plus fréquents avec des doses plus élevées.

Des EI ont été rapportés par 77 patients sur 82 (94%), 56 sur 67 (84%) et 55 /76 respectivement dans les groupe 20 mg, 10 mg et placebo. Dans 89% des cas ces évènements ont été jugés faibles à modérés. Sur les 26 patients (17,4%) ayant présenté des EI jugés comme sévères 7 étaient attribuables au traitement par CBD.

6 patients dans le groupe 20 mg et 1 dans le groupe 10 mg ont interrompu le traitement et sont sortis de l’essai.

14 patients (9%) ont présenté une élévation des aminotransférases hépatiques de 3,2 à 12,2 fois la normale. Tous les patients concernés recevaient concomitamment du valproate de sodium [4].

la HAS souligne « l’absence de données robustes sur la qualité de vie et l’absence de données d’efficacité et de tolérance du CBD, notamment en termes d’impact sur la détérioration neurocognitive et le développement psychomoteur des patients », quand le produit est prescrit au long cours [5].

Chez les patients présentant un syndrome de Dravet ou un syndrome de Lennox-Gastaut avec des crises convulsives réfractaires aux traitements habituels l’ajout de CBD permet une réduction de la fréquence des crises comparativement au placebo mais aux dépens d’une augmentation des effets indésirables parfois sévères.

Références:

[1]. Lattanzi S, Brigo F, Cagnetti C, Trinka E, Silvestrini M. Efficacy and Safety of Adjunctive Cannabidiol in Patients with Lennox-Gastaut Syndrome: A Systematic Review and Meta-Analysis. CNS Drugs. oct 2018;32(10):905-16.

[2]. Devinsky O, Patel AD, Cross JH, Villanueva V, Wirrell EC, Privitera M, et al. Effect of Cannabidiol on Drop Seizures in the Lennox-Gastaut Syndrome. N Engl J Med. 17 mai 2018;378(20):1888 97. (Cité le 07/05/2023).

[3]. Georgieva D, Langley J, Hartkopf K, Hawk L, Margolis A, Struck A, et al. Real-world, long-term evaluation of the tolerability and therapy retention of Epidiolex® (cannabidiol) in patients with refractory epilepsy. Epilepsy Behav. avr 2023;141:109159.

[4] Miller I, et al. Dose-Ranging Effect of Adjunctive Oral Cannabidiol vs Placebo on Convulsive Seizure Frequency in Dravet Syndrome: A Randomized Clinical Trial. JAMA Neurol. 1 mai 2020;77(5):613 21.(Cité le 09/05/2023)

[5]. HAS Avis sur Epidyolex. (Cité le 09/05/2023).

Qualité de la preuve : Grade 3.

Mots clés : cannabis ; épilepsie ; traitement ; évènements indésirables [cannabis ; epilepsy ; treatment ; adverse effects].

Y a-t-il des interactions médicamenteuses ?

Des études suggèrent que certains effets indésirables pourraient être dus à des interactions pharmacologiques susceptibles de limiter les possibilités de traitement.

Dans une méta-analyse de 4 essais contrôlés randomisés [1] l’efficacité du cannabidiol (CBD ; ÉPIDYOLEX® 10 et 20 mg/kg/jour) a été évaluée séparément ou concomitamment à un traitement par CLOBAZAM (CLB).

Les résultats sont favorables au CBD que ce soit avec ou sans adjonction de CLB. Comparativement au placebo la réduction moyenne de fréquence des crises était de 0,59 (0,52-0,58 ; p < 0,0001) et 0,85 (0,73-0,98 ; p = 0,0226) respectivement avec et sans CLB. L’Odds ratio (OR) du taux de répondeurs à 50% était de 2,51( 1,69-3,71 ; p < 0,0001) et 2,40 (1,38-4,16 ; p = 0,0020) avec et sans CLB.

Les EI (somnolence, éruptions cutanées, pneumonie, agressivité) étaient plus fréquents avec CLB que sans.

Le CBD est efficace avec ou sans CLB mais il existe un possible effet synergique entre les deux produits, mais avec un taux d’EI plus élevé avec le CLB.

Référence :

[1]. Devinsky O, Thiele EA, Wright S, Checketts D, Morrison G, Dunayevich E, et al. Cannabidiol efficacy independent of clobazam: Meta‐analysis of four randomized controlled trials. Acta Neurol Scand. déc 2020;142(6):531 40.

Qualité de la preuve : Grade 3

Mots clés : cannabis ; épilepsie ; traitement ; interactions médicamenteuses ; évènements indésirables [cannabis ; epilepsy ; treatment ; drug interactions ; adverse effects].